Perdu dans le vaste ciel, le garçon soupirait. En cet instant, il détestait l'étourderie de son père, la gentillesse de sa mère, la brise iodée qui laissait une empreinte salée sur ses lèvres et - plus que tout - l'ignoble chien d'une des passagères qui ne semblait pas vouloir la fermer. Le petit bout d'homme aurait tout donné pour être dans son lit plutôt que sur la navette menant à l'île des grosses têtes.

Qu'est-ce qu'il s'ennuyait.

Regarder les passagers se presser - voir magistralement se ramasser à terre - pour monter à quelques minutes du départ le distrayait à peine, le petit doigt s'activant sur son oreille droite, il jeta un regarde lasse sur la jeune femme qui arrivait sur le pont arrière.

Le cliquetis de ses talons résonnait en rythme avec sa démarche assurée. Pas même essoufflée, le petit sourire supérieur qu'elle affichait semblait crier qu'elle avait parfaitement calculé son arrivée et ne c'était démenée à courir. Le petit gars releva un sourcil, intrigué par l'aura de la jeune femme.

Elle lui faisait face, accoudée à la rambarde opposée, mains dans les poches et en toute honnêteté, il n'arrivait pas à déterminer dans quelle catégorie la classer. Élève ? Simple employée ? Petite copine d'un des frimeurs de l'ïle voisine ?

Ses cheveux se livraient bataille dans un fouillis d'encre, seul la garçonne qui les réglementait, limitait les dégâts. Ainsi, malgré le vent agité on avait tout loisir d'observer l'onyx de ses yeux, choyé d'un maquillage charbonneux. Pourtant, de là où il se trouvait, l'enfant ne verrait jamais la petite cicatrice bordant l'oeil droit de la brune, celui-ci était - de toute manière - bien plus intéressée par le grain de beauté sous les lèvres enrobées de rouge.

C'était une belle femme.

Plus que son visage, sa peau de pêche éclatée de grain de beauté où ses longues jambes, le soin de sa tenue qui soulignait parfaitement sa féminité et cette assurance qu'elle dégageait donnait envie au jeune garçon de la qualifier de dame, telles celles qu'il apercevait dans les vieux feuilletons que sa mère regardait le dimanche après-midi.

Relevant les yeux, il rencontra ceux de la jeune femme. Rouge de c'être fait prendre, il rompit le contacte derechef, et manqua ainsi le sourire moqueur de la jeune femme. De son observation, il restera inconnue de sa fine musculature et de ses oreilles percées, de ses ongles rongées mais surtout, des nombreux tatouages à inspiration nippone parcourant son corps.

Pourtant, il est bien une chose sur laquelle il aura eu une réponse, c'est que la jeune femme, après que le clébard soit venu lui reniflé la cheville et qu'elle l'ait gentiment congédié d'un coup de pied, n'était peut être pas tant une dame que ça.